Homélie du cinquième dimanche de Pâques Année C

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  • Actes des Apôtres 14, 21 – 27 ;
  • Apocalypse 21, 1 – 5 ; 
  • Jean 13, 31 – 35.

Plan

Nous commenterons principalement l’évangile ; et cela en trois moments : 1° situer le texte ; 2° vérités théologiques de a croix ; 3° nouveauté du commandement de  l’amour.

1. Situation du texte

Après le lavement des pieds et son explication, puis la désignation du traître, Jésus prononce deux discours d’adieu (Jn 13, 31-16, 33) auxquels s’ajoute la « prière sacerdotale » (Jn 17). Ces trois textes sont sans parallèles dans les synoptiques. En recourant au genre littéraire du discours d’adieu qui est connu aussi bien du monde juif que de dans l’Antiquité gréco-romaine, Jean, dans l’évangile, emprunte une forme d’expression particulièrement féconde pour son projet théologique.  Ces trois prises de parole successives permettent à Jean, en effet, de formuler, avant même que la passion ne débute, la signification globale de l’histoire de Jésus de Nazareth. Comme on peut le remarquer, ces discours ont, premièrement, une portée rétrospective et disent la signification de la venue du Fils de l’homme et, singulièrement,  de sa mort en croix. Deuxièmement, ces discours esquissent une prospective en montrant comment cette histoire ouvre un avenir fécond pour ceux qui se réclament du Crucifié-élevé, c’est-à-dire du ressuscité.

Le premier discours d’adieu (Jean 13, 31-14, 27-31) comprend une introduction (Jn 13, 31-38), suivi d’un développement ou le corps du discours (Jn 14, 1-26) et une conclusion (Jn14, 27-31). L’introduction dont nous venons d’écouter la lecture trace le cadre herméneutique qui permet de donner sens à la mort imminente de Jésus. Cette tâche d’interprétation est assumée par Jésus lui-même [au cours du repas, quand Judas fut sorti, Jésus pris la parole…], ce qui indique que la mission de Jésus consiste principalement à révéler Dieu aux hommes ; l’œuvre de Jésus est un travail de révélation [l’œuvre de Dieu en l’homme, c’est de croire en celui qu’il a envoyé]. Ce faisant, Jésus prend, mieux il révèle des décisions ou des vérités qui expriment clairement son message théologique à travers le signe de la croix.

2. Le message théologique

En contexte pascal, l’évangile selon Saint Jean nous donne de dégager des vérités par lesquelles Jésus se révèle comme « Fils de l’homme », chargé de révéler Dieu, son Père. En tant que fils de l’homme, Jésus permet, à ses disciples et à nous aujourd’hui, de se rendre à l’évidence que :

  • Premièrement, la crucifixion annoncée est l’événement décisif de la « glorification » du Père et du Fils (Jn 13, 31-32). Ainsi, la mort de Jésus n’est pas à saisir comme le signe de l’absence de Dieu, mais comme celui de sa présence plénière. Désormais, la mort n’est plus un lieu de silence, mais celui de la révélation du Dieu-Père ; la mort n’est plus non plus un échec, mais un accomplissement.
  • Deuxièmement, la croix est un événement productif, car en elle s’accomplit le départ de Jésus vers Dieu, son Père (Jn 13, 33). Cette métaphore signifie que la mort de Jésus n’implique pas la rupture de sa relation avec son Père, au contraire en elle s’épanouit et se renforce la communion de Dieu avec Jésus et, partant, avec tous ceux qui auront cru ;   
  • Troisièmement, la mort de Jésus est l’expression de son amour pour les siens (Jn 13, 34-35). Cet amour donné est la force qui permet aux disciples de ne pas s’enfermer dans un passé révolu, mais de s’ouvrir à un avenir perçu désormais comme l’espace de leur fidélité dans la communauté et dans le monde ;
  • Quatrièmement, enfin, la mort du provoque une totale réinterprétation du sens de notre vie à la suite du Christ et de notre relation avec lui (Jn 13, 36. 38). Seul le disciple qui accepte la radicale réalité de la mort de Jésus, et en conséquence de sa présence-absence [Jn 14, 1-26], est en mesure de s’ouvrir à une relation avec le Crucifié-glorifié. Il s’ensuit ainsi que le chrétien, qui s’accrocherait au Jésus terrestre, nierait la nécessité de sa mort et le pouvoir transformateur qui est liée à son statut du Fils de l’homme, du serviteur souffrant dont parle abondamment le Prophète Isaïe (Is. 42. 49. 50, 4-9 ; Mt. 12, 18-21) et qui transforme et purifie la création ; c’est ainsi que l’auteur du livre de l’Apocalypse peut voir un monde dans lequel la mer, lieu du chaos, n’aura plus de place (Ap. 21, 1-5). Cette vérité est tellement forte qu’on peut, facilement, dire que la vie à la suite du Fils de l’homme commence avec l’événement pascal qui rend le Christ au croyant sous une forme différente : En Jésus-Christ, Dieu est manifesté comme le Tout-autre (cf. le récit du disciple d’Emmaüs). Ce texte nous envoie un message très interpellateur !        

3. Message et actualisation

Lorsque Jésus parle de lui-même, il utilise le titre mystérieux du Fils de l’homme. Il s’agit justement de ce fils qui qui va entrer dans la gloire, mais en passant par le chemin de lacroix par amour pour les hommes. Le passage de l’évangile de ce jour, situé avant la passion, montre, à quel point, toute l’œuvre de Jésus ne fait qu’un et se déroule selon la logique de l’obéissance de l’amour :

  • L’amour du Père qui ne veut pas voir l’homme, en dépit de son péché,  à jamais séparé de lui ;
  • L’amour de Jésus pour son Père. Par amour, en effet, Jésus accepte la mort pour racheter les hommes de la désobéissance originelle ;
  • L’amour de Jésus pour les hommes parce que c’est pour nous les hommes et pour notre salut qu’il a souffert sa passion et a connu la mort.

A la suite du Christ, nous sommes, à notre tour, engagés dans ce grand mouvement d’amour pour le Père, pour le Christ et pour tous ceux que le Christ place sur nos routes pour affermir leur foi et leur espérance et, comme Paul, les exhorter à la fidélité en enseignant l’inévitabilité de la souffrance pour entrer dans le règne de Dieu (Actes des Apôtres 14, 22). A travers le don de sa vie par amour, le Christ nous enseigne l’amour du prochain que Jésus lui-même réalise déjà dans sa chair même. Nous serons vraiment ses disciples si nous aimons nos semblables et si nous pouvons les aimer jusqu’au détriment de notre vie ; mais d’abord, aimer les prochains, dans le quotidien le plus simple qui est souvent le plus exigeant ; c’est pourtant le lieu où nous devrions apprendre à aimer et à devenir capable de donner notre vie pour les autres.

La Loi de l’A. T. prescrivait déjà l’amour du prochain (Lv. 19, 18). Mais le commandement du Christ est nouveau puisque Jésus lui-même en donne un sens particulier : au sein de la communauté des disciples, Jésus invite chacun à se mettre au service des autres comme en témoigne le rite de lavement des pieds (Jn 13, 1-5) et à donner de lui-même pour les autres ainsi qu’on peut le voir dans l’exemple de Jésus se donnant pour le salut du monde. Par sa vie, Jésus nous a montré que le désir de Dieu est de rassembler tous les hommes pour les conduire à la vie d’éternité. Depuis l’événement pascal, le chemin de l’éternité est connu : c’est celui que Jésus incarne, le chemin de l’amour de l’homme qui révèle Dieu comme un Père et qui nous accueille tels que nous sommes et fait de nous des créatures nouvelles. Que la Vierge Marie, Mère du perpétuel secours et Saint Joseph, son chaste époux nous assistent sur le chemin tortueux de notre pérégrination vers la demeure du Père.

Père Pierre G. Mubambar, Pss   

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